L'investigation c’est de la Collaboration: Comment faire pour que ça fonctionne
Par Ankita Anand
En Bref: N'investiguez jamais seul⋅e. La collaboration est essentielle à votre sécurité, votre bien-être et votre efficacité en tant qu'investigatrice, investigateur, quel que soit le contexte. Mais que signifie collaborer et quels types de collaborations sont possibles ? Ce guide vous aidera à planifier, organiser et gérer la mise en collaboration avec des investigatrices, investigateurs, avec des sources et d'autres personnes afin de tirer le meilleur parti de vos propres compétences et de l'expertise des autres membres de votre équipe.
N'investiguez jamais seul⋅e !
Des collaborations ont lieu tous les jours dans nos vies personnelles et professionnelles. Si nous parlons de cette dernière, nous constatons que dans tout cadre de travail, des personnes possédant des compétences et des expériences différentes se réunissent pour atteindre un objectif et un programme communs. Dans le contexte des investigations, la collaboration se produit généralement lorsqu’un groupe de personnes ayant des expériences différentes s’intéresse à une question d’intérêt public. Or, comme les compétences et les capacités de chacun⋅e sont limitées, tout le monde a besoin de l’aide d’autres personnes qui apportent leur propre expertise et leurs propres ressources. Même si une personne possède un ensemble de compétences diverses, le fait de faire appel à des individus différents permet également à chacun⋅e de consacrer tout son temps et toute son attention à ses tâches spécifiques, ce qui est particulièrement important pour les projets de grande envergure.
Il n’est pas nécessaire que tous les membres de l’équipe soient directement engagé⋅e⋅s dans la thématique de l’investigation elle-même. Parmi les collaboratrices, collaborateurs, essentiel⋅le⋅s, on peut citer les personnes qui exposent efficacement les résultats de l’investigation à une organisation, à un gouvernement, à une cour de justice ou au grand public. Un autre exemple est celui d’une personne qui travaille régulièrement avec des données, comme un⋅e analyste ou un⋅e économiste, qui pourrait aider l’équipe à donner un sens aux chiffres impliqués dans une affaire de corruption. Et un⋅e graphiste pourrait savoir comment les présenter à un public de manière simple et compréhensible. Un⋅e artiste visuel et/ou un⋅e photographe pourraient également prêter main forte en apportant un reflet les résultats de l’investigation dans un format qui capte l'attention ; de même qu’une développeuse, un développeur de site web, si nécessaire. Les journalistes et les organes de presse peuvent contribuer à rendre les nouvelles informations accessibles à un public plus large. Les activistes, les universitaires et les chercheuses, chercheurs peuvent contribuer à une investigation, de la recherche de base, à la vérification et au contrôle des faits, comme aux phases de publication et de sensibilisation.
Les collaborations peuvent avoir lieu à différents niveaux. Il peut y en avoir une entre un⋅e citoyen⋅ne à un niveau local et un chercheur, une chercheuse d’une ONG travaillant dans la capitale nationale. Il existe également des équipes d’investigation transfrontalières travaillant aux niveaux régional et mondial. Les facilitatrices, les facilitateurs locaux sont particulièrement utiles à une investigation, car ils et elles permettent aux personnes en investigation d'obtenir des ouvertures.
Quels sont les avantages de la collaboration?
Les avantages de la collaboration sont infinis : trouver de meilleurs éléments de preuves, créer un impact plus fort, échanger des informations ou des connaissances, combler les lacunes en matière d'expertise ou d'accès et, enfin et surtout, assurer la sûreté et la sécurité des membres du groupe de collaboratrices, collaborateurs. L'époque où investiguer seul⋅e était la clé pour s'assurer l'exclusivité de la découverte d'un acte répréhensible ou d'une nouvelle est révolue. Même les journalistes d'investigation les plus endurci⋅e⋅s admettent aujourd'hui que les enquêtes menées par des « loups solitaires » ne sont plus une bonne idée (si elles l'ont jamais été). Les réseaux collaboratifs (en anglais, Networks of collaboration) peuvent apporter une robustesse considérable aux informations recueillies et à leur diffusion.
Le fait que des personnes s'unissent pour dénoncer des actes répréhensibles ou dire la vérité aux autorités de pouvoir facilite les investigations, tant au niveau des conclusions que de la présentation ; cela protège mieux les investigateurs et investigatrices, et exerce une pression accrue sur les autorités et les gouvernements pour qu'elles et ils rendent des comptes. Pour beaucoup de gens, il peut être difficile de savoir où chercher du soutien, des financements et des plateformes de collaboration. Cependant identifier ne serait-ce qu'une seule personne pour collaborer, dont le travail implique des investigations, peut vous mettre en relation avec d'autres collaboratrices, collaborateurs et avec les ressources nécessaires à la réalisation du projet. Pour vous aider dans le processus d'investigation, les autres parties du kit Exposer l'Invisible détaillent les meilleures pratiques, outils et techniques.
Des personnes différentes, des compétences différentes
Il faudrait à une personne toute une vie ou plus pour apprendre toutes les compétences utilisées dans les différents types d'investigations. Dans le cadre d'une collaboration, plusieurs personnes aux compétences uniques peuvent travailler simultanément à la réalisation d'un même objectif. Même si une personne possède plusieurs compétences, ce qui est passionnant et utile pour les projets à petit budget, il est toujours préférable que votre projet génère du travail et des revenus pour plusieurs personnes qui ont des années de formation et d'expériences dans le milieu.
Toucher un public plus large
Chaque personne est membre d'une communauté, qu'il s'agisse d'un cercle social ou d'un réseau professionnel, et les personnes de ces cercles et réseaux ont à leur tour leurs propres communautés. Le fait d'avoir plusieurs personnes dans une équipe signifie que les résultats peuvent être distribués de manière non linéaire à un plus grand nombre de personnes. Plus il y a de personnes, plus il y a de moyens potentiels de faire passer le message. Certaines d'entre elles ont un large public, comme un organe de presse, une organisation comptant un grand nombre d'abonné⋅e⋅s à une lettre d'information, une personne utilisant des outils d'engagement d'audience efficient ou une personne ayant une forte présence sur les médias sociaux. Une portée plus large est synonyme d'un impact plus fort.
Contourner les restrictions de voyage
La collaboration a pris une importance renouvelée à la lumière des nombreuses restrictions de voyage liées à la pandémie. Il existe également des obstacles permanents tels que les règles relatives aux visas et les restrictions budgétaires. Que ce soit dans votre propre pays ou ailleurs dans le monde, au lieu de voyager, l'option la plus viable est de se connecter avec des personnes déjà sur place pour accomplir le travail.
Partager le travail
Une investigation à grande échelle peut sembler attrayante parce qu'elle est susceptible de faire grand bruit avec des révélations d'une portée considérable. Mais une fois que vous commencez à éplucher les couches et à vous noyer dans les documents, il est courant d'être submergé⋅e par la confusion et l'anxiété lorsque l'excitation initiale s'estompe. Un⋅e partenaire ou une équipe vous aide à rester sain⋅e d'esprit et vous rappelle que vous n'êtes pas seul⋅e.
Assurer la responsabilité
Si vous avez entrepris un projet volontairement et qu'il n'est pas soutenu par une organisation ou un groupe engagé, il peut être mis en suspens ou vous pouvez l'abandonner complètement. La présence d'une collaboratrice ou d'un collaborateur crée un sentiment de responsabilité mutuelle, ce qui peut réduire les risques d'abandon du projet.
Assurer l'égalité sur le lieu de travail
Les investigateurs et investigatrices au niveau local sont souvent ceux et celles qui travaillent le plus dur pour enquêter sur les problèmes qui touchent leur communauté, or ils et elles ne sont pas suffisamment reconnu⋅e⋅s. Si une investigatrice, un investigateur s'appuie sur une personne locale pour faciliter l'enquête, c'est équitable et juste que l'habitant⋅e soit traité⋅e comme un collaborateur, une collaboratrice égal⋅e dans l'histoire. Si le collaborateur, la collaboratrice est un⋅e journaliste, la reconnaissance pourrait prendre la forme d'une signature de publication commune et d'un paiement partagé. S'il s'agit d'un⋅e associé⋅e qui ne souhaite pas être nommé⋅e ou qui aide à la logistique mais n'est pas directement engagé⋅e dans l'investigation, une compensation pour le temps ou les frais encourus peut être suffisante. Dans le cas d'un⋅e activiste, d'une personne citoyenne qui investigue ou d'un groupe de membres actifs de la communauté, vous pourriez les mettre en relation avec des ressources qui les aideraient à poursuivre leur travail.
Apporter de l'authenticité
Certains investigateurs, certaines investigatrices sont critiqué⋅e⋅s à juste titre pour leur parachutage, un terme négatif utilisé pour désigner une personne étrangère qui arrive dans une zone locale (en travaillant parfois avec de nombreuses hypothèses non vérifiées), qui mène rapidement une enquête et repart aussitôt. Dans ces cas, il est possible que les réalités, l'histoire et le contexte locaux soient déformés. Si une telle histoire désinforme des personnes influentes comme les décideurs et décideuses politiques, la vie de communautés entières pourrait subir les conséquences de politiques élaborées sur des bases inexactes. S'associer à quelqu'un⋅e qui apporte une connaissance locale approfondie permet d'éviter les abus sur une communauté locale ou sa représentation inexacte.
Offrir une perspective
Aussi bien informée soit-elle, une personne ne peut pas apporter une perspective d'ensemble sur une histoire, surtout en un temps limité. Lorsque des personnes d'horizons différents collaborent, elles apportent des questions et des liens auxquels la personne vivant sur place n'aurait même pas pensé, car nous avons tendance à considérer comme acquis un grand nombre de faits concernant la situation dans laquelle on se trouve. Le point de vue d'une personne extérieure vous fait prendre conscience que certains de ces éléments doivent être remis en question ou expliqués au cours de l'investigation, afin qu'un plus grand nombre de personnes puissent comprendre les résultats.
Améliorer la sécurité
Les attaques contre les lanceuses et lanceurs d'alerte ont considérablement augmenté, même dans des endroits qui étaient auparavant considérés comme « sûrs ». Cependant le nombre fait la force : travailler en groupe permet de se protéger et de protéger son travail.
Si un rapport est supprimé dans un pays, il peut être accru dans d'autres pays.
Exemple :
Forbidden Stories est un exemple de programme qui vise à poursuivre et à publier le travail de journalistes confronté⋅e⋅s à des attaques.
Le Signals Network est une organisation qui permet des collaborations sûres et éthiques entre les médias et les lanceuses, lanceurs d'alerte pour faire avancer l'intérêt public et encourager la transparence et la responsabilité.
Tout comme une personne au niveau local jouit d'une plus grande confiance au sein de sa communauté, un étranger, une étrangère, peut également être en mesure d'accéder à des personnes et à des lieux en vertu des privilèges dont il, elle, bénéficie en tant que personne extérieure. Une investigatrice, un investigateur issu⋅e de la communauté locale pourrait parfois, à un moment donné, passer aussi « sous le radar ». En outre, les personnes étrangères qui ont l'intention de partir après l'investigation seront beaucoup plus à l'abri des risques qu'une personne qui doit continuer à vivre sur place.
Apporter la diversité des genres et des cultures
Des coéquipières, coéquipiers, de sexe différent facilitent l'accès à différents lieux et personnes. Une femme qui a subi des violences sexuelles préférera peut-être parler à une femme, tandis que certains lieux religieux n'autorisent l'accès qu'aux hommes. Les investigatrices, investigateurs, LGBTQI+ et/ou celle et ceux qui sont sensibles aux communautés marginalisées peuvent parfois avoir accès à leurs communautés respectives plus facilement que d'autres.
Or tout n'est pas qu'une question d'accès. Une équipe plus diversifiée permet de respecter le droit de la personne interviewée à discuter avec quelqu'un⋅e qui est le plus proche de son expérience vécue, qui l'a suffisamment étudiée ou qui a reçu une formation pertinente. Ainsi, votre investigation peut mieux refléter la compréhension des personnes interrogées. Celles-ci n'ont pas à faire le travail d'effort de partage de tout le contexte de leurs réalités vécues, ce qui aide à des entretiens plus profonds et plus significatifs. Un mélange d'identités culturelles chez les collaboratrices, collaborateurs apporte également des points de vue et des enseignements uniques à l'investigation.
Constituer l'équipe (de rêve)
Pour constituer une équipe solide et équilibrée, pensez à ce dont votre projet a besoin et à ce que vous recherchez chez vos collègues pour subvenir au besoin de celui-ci. Dressez la liste des compétences, des sources et des ressources dont vous disposez déjà, ainsi que de celles qui sont nécessaires à l'investigation. Pensez également au-delà de l'équipe elle-même. Vous pouvez faire appel à des expert⋅es en la matière pour une partie ou la totalité de l'investigation. Vous pouvez également faire appel à un réseau de soutien composé de conseillers et conseillères allié⋅e⋅s qui ne font pas partie de l'équipe et qui sont disposé⋅e⋅s à discuter de manière informelle de leurs expériences.
Nous vous proposons ci-dessous une liste de questions à vous poser, cependant veillez à adapter votre propre liste à votre environnement et à vos besoins spécifiques.
Ce qu'il faut rechercher dans une équipe
Des compétences complémentaires, la maîtrise des langues locales et l'accessibilité
Quels sont les documents/lieux/personnes auxquels vous n'avez pas accès et quelle personne est en mesure d'obtenir cet accès ?
Si vous vous rendez dans un endroit dont vous ne parlez pas la langue locale, ou même si vous devez mener des entretiens à distance avec des personnes dont vous ne parlez pas la langue, qui peut vous aider en tant qu'investigatrice, investigateur, local⋅e fiable ou en traduction ?
Si une communauté est connue pour être fermée et ne pas interagir avec les personnes venues de l'étranger, y a-t-il un⋅e activiste local⋅e ou d'autres membres de la société civile travaillant avec la communauté depuis des années qui pourraient être un⋅e allié⋅e qui vous aide à l'accessibilité et la confiance ?
Compétence d'expertise
L'investigation est-elle susceptible de vous mettre dans des situations hostiles ? Si oui, connaissez-vous quelqu'un⋅e qui a suivi une formation sur les environnements hostiles ou la réduction des risques et qui peut la partager avec l'équipe ?
Vous attendez-vous à recevoir beaucoup d'informations sensibles de vos sources par voie numérique ? Si oui, pouvez-vous trouver quelqu'un⋅e qui puisse assurer la sécurité numérique de l'investigation ?
Si vos conclusions doivent être présentées en ligne, et surtout si votre public est composé de nombreux et nombreuses jeunes, quelqu'un⋅e peut-il vous aider à concevoir une plateforme interactive ?
Si l'investigation doit produire de nombreux moments de terrain et visuellement forts, pourriez-vous contacter un⋅e cinéaste ou un⋅e photographe ?
Si l'affaire comporte beaucoup de jargon juridique, ou si les personnes exposées sont susceptibles de porter plainte pour diffamation, pourriez-vous prendre contact avec un⋅e avocat⋅e travaillant sur des questions similaires ?
Planification et organisation pour l'équipe
Faites un plan
Planifiez votre investigation et identifiez les rôles que vous pourriez vouloir remplir pour l'exécution de votre plan d'investigation. Le fait d'avoir un plan sommaire vous donne une idée des activités que vous pourriez entreprendre et des rôles et compétences des personnes avec lesquelles vous voulez travailler. Pour avoir un aperçu des éléments les plus importants d'une investigation, consultez le guide « Les ingrédients d'une investigation » qui se trouve ailleurs dans le Kit "Exposer l'Invisible".
Tendre la main à des collaborat⋅eur⋅rice⋅s potentiel⋅le⋅s
Vous connaissez peut-être directement des investigatrices, investigateurs, ou connaissez d'autres personnes qui ont ses connaissances. Si une organisation a réalisé des travaux sur une question problématique, vous pourriez la contacter pour une collaboration. Elle pourrait également vous parler d'autres personnes avec lesquelles elle a travaillé et qui pourraient être intéressées par la poursuite du sujet. Lorsque vous lisez des articles sur le sujet qui vous intéresse, vous pouvez prendre contact avec les auteurs, les autrices, pour leur demander s'ils, elles, souhaitent se joindre à votre investigation, ou si les sources qu'ils, elles, ont interrogées souhaitent le faire.
Les médias et réseaux sociaux sont également un bon moyen d'établir un contact si vous ne parvenez pas à trouver leurs coordonnées en effectuant des recherches en ligne. Les gens utilisent régulièrement LinkedIn, Twitter, Instagram et Facebook pour entrer en contact avec de nouvelles personnes. Il n'est pas nécessaire d'être présent⋅e sur toutes ces plateformes pour établir des connexions. Par exemple, de nombreuses personnes ont leur adresse électronique dans leur biographie Twitter, à laquelle vous pouvez accéder sans avoir à vous créer un compte Twitter. Si vous ne trouvez pas les personnes que vous recherchez, vous pouvez contacter des organisations affiliées ou des collègues et demander de vous présenter mutuellement.
Dans la mesure du possible, les ateliers en ligne ou hors ligne, les conférences et autres événements liés à l'investigation constituent l'un des meilleurs cadres pour rencontrer des collaborateurs, collaboratrices, potentiel⋅le⋅s, lancer des idées ou des propositions de collaboration, et avoir des entrevues de présentation mutuelle, qui peuvent donner le coup d'envoi de nouveaux projets.
Les plateformes de collaboration
Il existe plusieurs plateformes spécialisées pour aider à mettre en relation les journalistes et les autres investigatrices, investigateurs, et sources de la société civile qui cherchent à collaborer. Ces plateformes fonctionnent souvent pour tous les sujets d'enquête. Help A Reporter Out / HARO aide les investigatrices, investigateurs à trouver les bonnes personnes avec qui travailler. Hostwriter and Global Investigative Journalism Network - GIJN sont deux plateformes où des collaborations ont régulièrement lieu. Le projet Unbias the News de Hostwriter invite à la publication d'histoires collaboratives et transfrontalières. Le projet Project Facet facilite également les collaborations.
Cependant, les groupes de médias sociaux en ligne et les profils individuels liés aux investigations peuvent aussi être utilisés pour entrer en contact avec des partenaires potentiels. Il suffit d'aller sur Facebook, Twitter ou LinkedIn et de taper des mots comme "enquête" ou "investigation", "OSINT - Open Source Intelligence". Sur Facebook, par exemple, en ajoutant le filtre "Groupes" lors de la recherche de ces mots clés, vous trouverez des groupes d'investigatrices, d'investigateurs, que vous pourrez demander à rejoindre. Ces groupes peuvent être spécifiques à une région ou à un sujet. N'oubliez pas que certains sont des groupes privés et qu'ils devront souvent effectuer une vérification de vos antécédents sur votre profil de médias sociaux ou se renseigner sur vous pour s'assurer que vous êtes digne de confiance.
Note :
Certaines rencontres et conférences sur l'investigation finissent également par créer une page de médias sociaux ou un forum de discussion sur leur site web, comme:
Dataharvest - la conférence européenne sur le journalisme d'investigation.
ARENA - l'organisation qui gère Dataharvest - héberge également un groupe de discussion et plusieurs réseaux thématiques que vous pouvez consulter et demander à rejoindre s'ils sont pertinents pour votre travail.
Le Global Investigative Journalism Network (GIJN) dispose d'un service d'assistance en ligne, ici un centre de ressources en français) qui comprend également des conseils sur la manière d'identifier les réseaux et les sources et collaborateurs possibles -identify networks and possible sources and collaborators.
Vous pouvez également créer votre propre groupe, ajouter des personnes que vous connaissez et, le moment venu, d'autres investigatrices, investigateurs, à la recherche de coéquipières, coéquipiers pourraient vous rejoindre.
Financement de la collaboration
Les collaborations ont besoin d'un financement, car, outre les dépenses liées à la logistique de l'investigation, toutes et tous les membres de l'équipe doivent être rémunéré⋅e⋅s équitablement. Clean Energy Wire, Hostwriter, Journalismfund.eu, European Journalism Centre, n-ost, Pulitzer Center sont autant d'orgnaismes qui encouragent les collaborations lors d'investigation par un soutien financier. Si vous les lisez attentivement, de nombreuses autres subventions prévoient également la possibilité d'avoir une équipe de deux ou trois personnes. À moins qu'il ne soit explicitement mentionné que seuls les individus peuvent postuler, n'hésitez pas à écrire à l'organisme qui octroie la subvention et à demander si vous pouvez postuler en tant qu'équipe. En outre, consultez les listes de ressources sur la collecte de fonds et les subventions et bourses que le GIJN met à disposition sur son site web, Fundraising et Grants & Fellowships
Inviter des collaborat⋅eur⋅rice⋅s à se joindre à vous
De nombreuses personnes obtiennent d'abord une subvention, puis cherchent des collaborat⋅eur⋅rice⋅s. De cette façon, ils, elles, font savoir aux gens qu'ils, elles, ont un projet financé en main, et pas seulement une idée dans leur tête. Grâce à l'assurance d'un financement, les nouvelles et nouveaux membres de l'équipe se sentent plus à l'aise pour investir leur temps, ce qui permet à l'initiateur ou l'initiatrice de disposer d'un vivier plus diversifié.
Cependant cette méthode a son revers de la médaille. L'envoi de demandes de subvention peut prendre beaucoup de temps. Cela peut représenter beaucoup pour une seule personne, surtout s'il s'agit d'un projet de grande envergure. Si quelqu'un⋅e parvient à obtenir une subvention, cela peut entraîner une hiérarchie implicite dans l'équipe. L'initiateur, initiatrice, ou le ou la "leader" peut penser qu'il, elle, a déjà fourni plus de travail que son voisin ou sa voisine et qu'il, elle, devrait avoir plus de poids dans le projet. Un⋅e nouvel⋅le arrivant⋅e peut avoir de véritables préoccupations concernant le projet, et ne pas en parler parce qu'il ou elle se sent coupable que le ou la "chef⋅fe de projet" a fait la plus grande partie du travail.
Si une collaboratrice, un collaborateur peut investir le temps nécessaire pour rejoindre la personne à l'initiative dès le début, tout le monde y gagne. D'une part, la proposition sera réaliste. Prenons l'exemple d'une collaboration internationale. Une collaboratrice ou un collaborateur ne promettrait pas d'apporter des informations de sa région dont il sait, en tant que résident⋅e de ce pays, qu'elles sont impossibles à obtenir. Les budgets établis seraient plus spécifiques à la situation économique des deux pays. Le calendrier serait établi en fonction des emplois du temps des deux personnes, plutôt que de laisser l'un⋅e se tuer à la tâche pour respecter le délai que l'autre a déjà promis aux bailleurs de fonds.
Choisir la⋅e(les) bon⋅ne(s) collaborat⋅rice⋅eur(s)
Les personnes qui s'inscrivent pour participer à un projet font généralement part de leur expérience professionnelle, des raisons pour lesquelles elles sont intéressées par l'idée, de ce qu'elles pourraient y apporter et de la manière dont elles pourraient le faire. Aussi n'oubliez pas que les CV et les biographies vous indiquent ce qu'une personne a fait, et non qui elle est, ce que vous devez nécessairement savoir pour pouvoir travailler avec elle.
Conseil :
Investissez des efforts pour connaître quelqu'un⋅e et faites confiance à votre intuition
Outre les échanges de courriels qui permettent d'établir un contact, un intérêt et des informations préliminaires, essayez de passer des appels vidéo, ou au moins des appels vocaux. Apprenez à vous connaître ; voyez si vous êtes compatibles en discutant de vos intérêts professionnels, de vos méthodes et de votre éthique de travail, de vos motivations et des résultats attendus en ce qui concerne l'investigation. Posez des questions sur le type de travail collaboratif qu'ils, elles, ont effectué dans le passé (il ne doit pas nécessairement s'agir d'une investigation). Découvrez s'ils, elles ont l'esprit d'équipe en discutant des zones de conflit potentielles ou en décrivant un scénario et en demandant comment ils, elles le géreraient. N'ignorez pas votre intuition à cause de certains faits, comme les réalisations figurant sur son CV. Il est essentiel d'avoir ces discussions avant de choisir une collaboratrice, un collaborateur.
Convenir des conditions de collaboration et d'une éventuelle rémunération
Lorsque les employeurs, employeuses, voient des CV, ils, elles, engagent des personnes pour effectuer une mission et les paient à la livraison. Même si cela n'est pas toujours reconnu explicitement, il existe toujours une sorte de hiérarchie du pouvoir. La personne engagée n'est payée que si elle livre la marchandise. Si elle ne le fait pas, elle risque de perdre sa rémunération, ainsi que sa propre réputation aux yeux de l'organisation.
Dans le cas de collaborations soutenues par des organisations, les gens sont parfois payés, du moins en partie, au début. Vous pourriez être dans un type de partenariat où la personne que vous choisissez n'est pas un⋅e employé⋅e, mais un⋅e partenaire égal⋅e. Vous ne voulez pas vous retrouver dans une situation où l'argent a déjà été distribué et où vous devez poursuivre des membres qui n'ont pas tenu leurs promesses. Si vous êtes le seul, la seule, à avoir lancé le projet au moment de l'approbation de la subvention et que vous avez impliqué des partenaires par la suite, vous risquez, en tant que « chef⋅fe de file », de perdre la confiance de l'organisation pour n'avoir pas tenu vos engagements.
Pour ces raisons, une convention préparée conjointement est indispensable. Voici quelques questions à se poser lors de la préparation d'une convention :
Comment et quand l'équipe doit-elle communiquer pour partager les mises à jour et poser des questions ?
Quels sont les résultats attendus pour chaque personne et dans quels délais ?
À quelle fréquence chaque membre partagera-t-il, elle, ses résultats ? (Ceci est particulièrement important si un⋅e membre de l'équipe se retire prématurément pour une raison imprévisible afin de s'assurer que l'équipe a accès à son travail).
Quel est le plan de secours au cas où l'équipe ne pourrait pas livrer ce qui a été promis ?
Quel est le délai raisonnable dans lequel on peut s'attendre à ce que les gens répondent aux messages ? Si une personne ne répond pas après ce délai, l'équipe peut-elle avancer sans elle, et dans certains cas, restreindre l'accès aux données partagées pour les membres de l'équipe qui ne communiquent pas ? (Il ne s'agit pas nécessairement de quelque chose contre la personne non communicante. Plutôt, s'ils ou elles ont été bloqué⋅es hors du système en place ou, pire, s'ils ou elles font face à une sorte de détention, restreindre leur accès permettrait non seulement de protéger les données mais aussi l'investigatrice, l'investigateur). S'ils ou elles réapparaissent plus tard avec une explication de leur silence, comment l'équipe procédera-t-elle alors ?
Quel est l'objectif final de l'investigation ? Partager les conclusions avec la communauté concernée, les soumettre à un tribunal ou les faire publier par les médias ?
Qu'adviendra-t-il des données/preuves/documents une fois l'investigation terminée ?
Conseil :
Élaborer un code de conduite commun
Outre l'élaboration d'un accord décrivant les détails de la collaboration, la gestion du travail et le calendrier, prenez le temps, en équipe, d'élaborer votre propre code de conduite axé sur les attentes mutuelles en matière d'éthique, de diversité et d'inclusion. Comme le début de toute bonne collaboration, ce code de conduite doit être rédigé en collaboration, et vous pourriez organiser une réunion en ligne ou physique (si possible) qui lui serait uniquement consacrée. Pensez à faire une séance de remue-méninges et à énumérer des aspects tels que : ce qui est acceptable comme comportement et ce qui ne l'est pas ; ce qui se passe si quelqu'un⋅e enfreint le code ; comment donner des retours constructifs ; comment éviter ou gérer les tensions, les frustrations et les comportements agressifs ; comment respecter la vie privée et la sécurité de chacun⋅e - ce qui est autorisé et ce qui ne l'est pas à cet égard, etc. Si vous collaborez au sein d'une équipe plus importante en taille, vous pouvez même charger un ou deux membres de l'équipe d'intervenir en cas de conflit ou de tension.
Vous trouverez plus de conseils sur la manière de mettre en place un code de conduite ou un accord de conduite partagée dans le dossier de ressources de Tactical Tech sur le genre et la sécurité (en anglais) pour les formations et les collaborations "Zen and the art of making tech work for you / Zen et l'art de faire la technologie travailler pour vous" (en anglais).
Régler les formalités administratives
Si une organisation parraine l'investigation, elle peut exiger que chaque membre de l'équipe signe un contrat avec elle. En lieu et place d'un contrat avec une tierce partie, la personne à l'initiative doit rédiger un document écrit garantissant la réalisation de certaines tâches dans un délai donné et moyennant une rémunération déterminée.
Avant que vous et l'équipe ne preniez la route
La sécurité avant tout !
Assurer la sécurité des collaboratrices, collaborateurs et essayer de prévoir les difficultés est une partie essentielle de votre investigation. Utilisez les principes « Ne pas nuire » ('Do No Harm' principle) afin qu'aucun⋅e participant⋅e à l'investigation, qu'il s'agisse de sources ou de collaboratrices, collaborateurs, n'en subisse des conséquences délétères.
Capture d'écran du manuel sur la Sécurité Holistique par Tactical Tech : https://holistic-security.tacticaltech.org/
Cela implique de comprendre l'environnement de travail, de choisir les bons outils et plateformes de communication et de procéder à une évaluation des risques. Pour en savoir plus sur les questions à prendre en compte pour protéger votre équipe, vos sources et votre investigation, consultez la section : Planification des mesures d'urgence.
Le risque est hérité :
Si vous et vos collaboratrices, collaborateurs ne présentez que peu ou pas de risques (par exemple, si vous vivez et travaillez dans une zone sûre), mais que vous interviewez une personne présentant un risque élevé (par exemple, si elle vit dans une zone dangereuse ou travaille sur des sujets controversés), vous héritez de ce risque. Votre niveau de risque sera plus élevé pendant un certain temps avant et après l'entretien. Si vous interviewez une personne pour un rapport ou un article qui sera publié, préparez-vous à ce que votre risque augmente au moment de la publication. Lorsque vous investiguez sur des personnes en position de pouvoir et d'influence, préparez-vous à un risque plus élevé et prolongé si elles ont connaissance de votre enquête.
D'un autre côté, tout comme vous héritez des risques des autres, ils et elles héritent des vôtres. Opérer dans une zone à faible risque ou avoir un profil à faible risque ne signifie pas que vous ne présentez aucun risque pour les autres. Au contraire, vous pouvez augmenter le risque des personnes avec lesquelles vous interagissez. Cela peut se produire lorsque votre comportement habituel dans une zone à faible risque peut très bien vous mettre en danger dans d'autres zones. Des actes simples tels que la communication par téléphone portable peuvent être sans danger pour une personne dans une zone à faible risque, cependant ce même acte peut facilement exposer quelqu'un⋅e à un danger dans une zone à haut risque.
Ces considérations doivent faire l'objet d'une attention particulière lorsque l'on travaille dans des régions ou sur des sujets différents, où les membres de l'équipe peuvent être basé⋅e⋅s dans des contextes variés et opérer dans des conditions de risque ou de menace particulières. L'ensemble de l'équipe doit prendre conscience des vulnérabilités possibles de chacun⋅e et s'efforcer d'établir une évaluation de la sécurité et un plan d'atténuation de ces risques. N'oubliez pas qu'une équipe est autant et toujours en sécurité que son membre le plus à risque.
Lisez notre article La sécurité avant tout ! (en français) dans ce kit pour connaître les considérations de sécurité de base lors d'une enquête.
Consultez le Manuel De Sécurité Holistique (en anglais) de Tactical Tech pour une approche détaillée qui intègre le fait de veiller soi-même sur sa santé, le bien-être, la sécurité numérique et la sécurité de l'information dans les pratiques traditionnelles de gestion de la sécurité des projets et organisations en configuration collaborative. Le manuel a été initialement conçu en pensant aux défenseuses et défenseurs des droits Humain comme public cible, il est tout aussi pertinent pour les investigatrices, investigateurs et toute personne travaillant en collaboration pour dénoncer les problèmes affectant leurs communautés.
Briefing de l'équipe
Une étape souvent négligée consiste à expliquer le projet aux nouvelles et nouveaux membres de l'équipe. Les personnes à l'initiative du projet ont une profonde connaissance de cette investigation, or tout le monde ne commence pas avec ce niveau de compréhension. Il faut d'abord que tout le monde soit sur la même longueur d'onde. Sinon, vous finirez par vous lancer dans des plans d'exécution du projet alors que certains collaborateurs, certaines collaboratrices ont encore des points d'incertitude liés à l'initiation du projet.
Après avoir partagé avec les nouvelles et nouveaux membres la proposition approuvée par celles et ceux qui financent, ainsi que les documents justificatifs, racontez-leur les anecdotes qui ne figurent pas nécessairement dans la candidature. Dites-leur comment vous avez eu l'idée, pourquoi l'histoire est importante pour vous personnellement, et tout autre aspect du projet qui peut aider les autres à créer leur propre lien avec le travail que vous êtes sur le point de faire. Il en va de même pour le budget : expliquez pourquoi vous avez choisi telle ou telle somme pour chaque catégorie de dépenses, et sur quoi vos calculs se sont basés. Si une allocation est incluse, s'agit-il d'un montant fixe alloué par les entités qui subventionnent ou avez-vous prévu un budget également à cet effet ? Dans ce dernier cas, quel était l'investissement en temps que vous aviez en tête ? Si le temps nécessaire semble supérieur aux honoraires des personnes qui investiguent, est-ce parce qu'il y avait un plafond externe fixé par les organismes de financement ? Ou est-ce parce que vous avez estimé qu'il était important de consacrer une partie de ce fonds à certaines autres dépenses ? Dans ce dernier cas, existe-t-il un plan permettant de mieux les rémunérer ultérieurement, après la diffusion publique des résultats ? Si la subvention de travail n'est pas divisée en parts égales, quelle est la raison de ce choix ? Cela indique-t-il également une division disproportionnée du travail ?
Une raison fréquente pour laquelle les gens collaborent est que le projet est trop important pour une seule personne. Dans le cas de projets plus conséquents en temps, les membres de l'équipe peuvent être amené⋅e⋅s à refuser d'autres missions. Pour un engagement à si long terme, il serait naïf de ne pas tenir compte du bien-être financier de toutes les collaboratrices, de tous les collaborateurs, pendant cette période, en particulier des indépendant⋅e⋅s.
Définir les rôles
Une division du travail bien définie est primordiale pour la collaboration. Déterminer qui supervise quoi dès le départ évite la confusion et les malentendus ultérieurs. Une fois les tâches assignées, il est également plus facile pour les individus de planifier leur emploi du temps en fonction du temps que chacune de leurs tâches leur prendra. Décidez s'il doit y avoir une coordinatrice, un coordinateur, de projet avec lequel tout le monde se sent à l'aise, quelqu'un⋅e qui sollicite des actualisations et envoie des rappels si nécessaire. Dans certains projets, une personne se consacre exclusivement à la gestion de l'équipe et s'assure qu'elle respecte le calendrier.
Logistique
Lorsqu'il n'y a pas de structure organisationnelle sur laquelle s'appuyer, un⋅e ou plusieurs membres de l'équipe doivent assumer le rôle de logisticien⋅ne. Cela peut sembler une tâche élémentaire, cependant certain⋅e⋅s investigatrices, investigateurs, ne veulent pas participer à ces modalités, qui peuvent aller de l'établissement des horaires au change d'unité monétaire pour l'équipe. Dans de telles situations, les équipes doivent trouver un moyen de répartir équitablement le travail.
Crédits et remerciements
Comment chaque personne doit-elle être créditée ? Par exemple, le rapport doit-il énumérer les noms dans l'ordre alphabétique ou doit-il être établi en fonction de celle, celui qui a écrit le plus ? Les gens négligent souvent ces questions parce qu'ils, elles, sont gêné⋅e⋅s de passer pour des personnes mesquines ou suffisantes. Mais vouloir être reconnu⋅e comme il se doit pour son travail est une préoccupation réelle. Si des questions restent sans réponse dans l'esprit des gens ou si des rancunes non exprimées persistent, elles mettent à mal les relations et, par extension, le projet. Si une personne à l'initiative parle lui-même, elle-même, de ces considérations, celles-ci éviteront de mettre les participant⋅e⋅s dans une position de controverse sur le droit à soulever ces points. La personne à l'initiative démontre ainsi sa bonne volonté et sa transparence.
Éthique et méthodologie
Asseyez-vous ensemble et convenez d'une éthique et de méthodes de travail communes. Il est important d'aborder cette conversation avec un esprit ouvert, car différentes personnes peuvent avoir des opinions différentes. Il est préférable d'avoir une compréhension commune dès le départ, plutôt que d'avoir à y faire face au milieu de l'investigation. Par exemple, certains investigateurs, certaines investigatrices, sont totalement opposé⋅e⋅s aux opérations d'infiltration ou à faire pression sur leurs sources pour qu'elles révèlent des informations, tandis que d'autres considèrent ces méthodes comme équitables lorsque le résultat peut conduire à la découverte d'un acte répréhensible.
Note :
La question de l'éthique s'étend aux décisions concernant les outils logiciels et les plateformes que vous pouvez choisir d'utiliser. Si les outils open source peuvent parfois présenter des limites pour la tâche à accomplir lors d'investigation, ils peuvent aussi souvent offrir une alternative aux outils commerciaux qui ne respectent pas toujours pleinement la confidentialité de vos données. Pour des exemples sur la façon de naviguer dans les choix de plateformes et les compromis, veuillez vous référer à l'article de Tactical Tech intitulé La Technologie Est Stupide : Comment choisir la technologie pour le travail à distance (en français)
Horaire
Certaines personnes aiment se coucher tôt et d'autres tard. Parfois, nos horaires sont déterminées par les sources de l'investigation ou par le temps limité pendant lequel un site sur le terrain peut être ouvert. Toutefois, lorsque ce n'est pas le cas, comme dans toute organisation, respectez les horaires de travail que vous avez établies afin que les gens puissent se déconnecter, se reposer, parler à leur famille ou se promener. Il n'existe pas de travail 24 heures sur 24 avec une productivité parfaite.
Vérifiez avec vos partenaires quels sont leurs points non négociables. Au-delà de quelle heure ne travaillent-ils, elles pas ? Comment se positionnent-elles, ils, pour de la gestion d'un développement inattendu pendant l'investigation s'il se produit un week-end ou un jour férié ?
Exigences en matière de santé
Si l'équipe doit se rendre sur un site qui implique un long voyage, tous les membres se sentent-ils, elles physiquement à la hauteur ? Dans le cas contraire, ceux, celles, qui restent peuvent-ils, elles, aider l'équipe à travailler sur un autre aspect de l'histoire ? Certains collègues doivent-ils, elles, respecter des horaires de repas stricts pour des raisons de santé ? Si oui, et si l'équipe travaille selon un horaire irrégulier en raison de facteurs indépendants de leur volonté, ces collègues pourraient peut-être emporter des aliments secs avec elles, eux. Les coéquipiers et coéquipières végétalien⋅ne⋅s ou végétarien⋅ne⋅s pourraient également trouver utile de faire de même, au cas où ils, elles, ne trouveraient pas toujours leurs préférences en tout lieu ou en tout temps.
Budgétisation
De nombreuses subventions sont flexibles quant à la quantité d'argent dépensée dans un but spécifique, tant qu'elle est consacrée à l'investigation. Cela laisse de nombreuses décisions financières à l'équipe. Une personne peut vouloir dépenser plus pour l'hébergement, tandis qu'un autre membre de l'équipe peut vouloir dépenser plus pour l'embauche de services tels que le tournage de film. Il est important de se mettre d'accord au préalable sur une répartition plus détaillée des dépenses, même si les organismes de financement ont approuvé un budget moins détaillé.
Les organismes de financement adoptent des budgets avec des réserves sur ce que leur soutien couvrirait ou non. Pourtant, au cours de l'investigation, des catégories de dépenses non-prévues peuvent apparaître. Dans la mesure du possible, et si vous n'avez pas besoin d'effectuer la dépense de manière urgente, il est bon de vérifier rapidement auprès des mécènes si ces types de coûts seront remboursés. Ce n'est peut-être pas une mauvaise idée de demander à être mis en relation avec l'équipe de comptabilité de l'organisme de financement. De nombreux services de comptabilité ont des règles extrêmement précises concernant les éléments qui seraient couverts, la manière dont la facturation doit être effectuée, etc. Parfois, tant les bénéficiaires de l'aide que les référent⋅e⋅s de l'organisme mécène ne sont pas pleinement conscient⋅e⋅s de ces subtilités. Il est préférable d'avoir cet éclaircissement avant de dépenser l'argent.
Note :
Ce que la réalité nous apprend
Chaque investigation met en lumière de nouvelles réalités que les mécènes et leurs services financiers n'ont peut-être jamais rencontrées auparavant. Le fait de partager régulièrement ces réalités avec elles et eux pourrait conduire à de nouvelles règles qui soutiennent l'imprévisibilité des investigations. Par exemple, le service comptable d'une organisation a un jour insisté pour obtenir une facture de taxi imprimée, alors que le chauffeur de la zone rurale qui avait emmené l'investigatrice, l'investigateur, était en situation d'illettrisme et n'était donc pas en mesure de la fournir.
Avant que les investigatrices, investigateurs, et les mécènes ne signent des protocoles d'accord, les premiers pourraient faire part de leurs préoccupations ou des leçons tirées de leurs expériences passées. L'argent a souvent tendance à créer une hiérarchie invisible entre donat⋅eur⋅rice et bénéficiaire. L'équipe peut donc hésiter à soulever un grand nombre de questions. Néanmoins, il est beaucoup plus facile de demander, de discuter et de se mettre d'accord à l'avance que de demander la modification des termes du contrat a posteriori. Les mécènes qui soutiennent régulièrement des investigations comprennent certaines situations imprévisibles qui peuvent survenir dans le cadre d'enquêtes et essaient d'être flexibles. Pour cela, il est important que l'équipe maintienne une ligne de communication active et honnête avec elles et eux.
Lettres d'intention
Une chose qui rassure les mécènes sur le fait que les résultats de l'investigation seront connus publiquement sont les lettres d'intention. Il s'agit de lettres envoyées par des organes de presse aux membres de l'équipe pour leur faire part de leur souhait de publier les résultats de l'investigation. De nombreux investigateurs, et nombreuses investigatrices, abandonnent l'idée de demander des fonds parce qu'ils, elles, hésitent à faire une requête pour ces lettres, qu'ils, elles, n'ont pas de réponse des journaux ou qu'ils, elles, trouvent gênant de demander une deuxième fois après l'échec de leur première proposition de subvention. Pour contourner ce problème, vous devez vous rappeler que :
Vous ne demandez pas vraiment à qui que ce soit de vous cautionner. En fait, de nombreux organes d'éditions, lorsqu'ils mentionnent leur intérêt pour la publication, ajoutent également une clause disant « sous réserve des règles éditoriales », ou quelque chose de ce genre. Les lettres d'intention ne fonctionnent généralement pas comme un accord juridique contraignant.
Vous n'êtes pas non plus lié⋅e⋅s par un accord juridique avec un journal pour publier avec lui. Si, à un moment donné, vous vous rendez compte que votre histoire convient mieux à une autre maison, vous pouvez en informer la première et la remercier de son soutien.
Les journaux, magazines, ont souvent des budgets de voyage limités. Si vous proposez un reportage d'investigation à un tel journal ou à un site web, qui ne peut payer que les frais de rédaction ou de photographie, il sera heureux de publier l'histoire à un coût bien inférieur à celui qu'il aurait dû payer pour faciliter une telle investigation.
Vous n'avez pas besoin d'obtenir des lettres des plus grands organes de presse. Si vous pensez que certains groupes plus petits ont été plus réactifs dans le passé, vous pouvez également les solliciter. Les mécènes se pencheront également sur vos travaux antérieurs ou sur les recherches préliminaires dont fait état votre demande pour connaître votre crédibilité. Par conséquent, vos chances d'obtenir la subvention ne dépendent pas entièrement des déclarations d'autres organisations.
Si un rédacteur en chef, rédactrice en cheffe, est prêt⋅e à fournir la lettre, et en revanche risque d'être trop occupé pour l'envoyer à temps, demandez s'il, elle, préfère un modèle de base qu'il, elle, pourra lire et signer. Ce modèle peut se limiter à quelques phrases indiquant que le journal est intéressé par l'investigation et souhaite en publier les résultats si toutes les conditions rédactionnelles sont remplies.
Post-production
Que se passe-t-il après la collecte des informations et la rédaction de l'article ou du reportage ? L'un⋅e des membres de l'équipe ou tous les membres de l'équipe décideront-ils des plateformes (organisations, sites web, événements, etc.) qui permettront de diffuser les résultats de l'investigation dans l'espace public, si tel est votre objectif ?
Par exemple, si vous envisagez de faire appel à des ONG et/ou à des organisations de médias pour publier vos résultats, il convient de s'entendre sur ce point en fonction de la réputation, de la capacité de distribution, du temps de réponse et de publication, des frais et d'autres facteurs qu'une telle plateforme de publication peut apporter. Si vous envisagez de créer et de gérer votre ou vos propres espaces de publication en ligne ou hors ligne, cela devra être convenu et planifié tout au long du processus d'investigation, et non pas laissé à la dernière minute, car la diffusion et la sensibilisation des histoires est un projet à part entière qui requiert des compétences particulières pour être efficace.
Plans d'urgence
Que faire lorsqu'un⋅e membre de l'équipe disparaît, doit se retirer en cours de projet ou ne fournit pas le travail attendu dans le cadre de sa collaboration ? Sur quels plans d'urgence pouvez-vous compter ? Une façon de minimiser ce genre de pertes est que le coordinateur, coordinatrice, du projet et peut-être un⋅e autre membre de l'équipe continuent de collecter à intervalles réguliers les travaux actualisés, les notes, les ensembles de données, voire les reçus de dépenses, etc. des investigatrices, investigateurs.
La sécurité avant tout! Planification des mesures d'urgence.
Le plan d'urgence a pour but de vous fournir un plan de secours au cas où votre plan initial échouerait ou serait affecté de quelque manière que ce soit. Le plan d'urgence doit faire partie de votre plan de sécurité global et des procédures de sécurité que vous devez mettre en place dès le début de vos activités de planification.
Il est facile de se perdre dans la logistique, comme la réservation de billets et d'hôtels. Par contre avant de vous y plonger, prenez le temps de faire une évaluation de la sécurité de l'endroit que vous visitez. Il n'existe pas d'évaluation unique. Un lieu peut être tout à fait sûr pour un membre de l'équipe, pour autant présenter de nombreux risques pour d'autres, en fonction de leur identité (sexe, religion, langue, etc.) et de leur relation avec le lieu.
Il est également important que chaque membre de l'équipe procède à une auto-évaluation honnête des risques auxquels il, elle, pourrait être confronté⋅e, et ne se sente pas obligé⋅e d'être « courageuse, courageux », invisibilisant toute considération. S'il y a une hésitation à ce sujet, il est bon de se rappeler que les menaces auxquelles une personne est confrontée peuvent avoir un impact sur l'ensemble de l'équipe et de l'investigation, il est donc préférable de ne pas minimiser les risques.
Voici quelques questions à se poser :
Quels sont les risques possibles à chaque endroit que l'équipe prévoit de visiter pour son investigation ?
Les membres à faible risque sont-ils, elles, prêt⋅e⋅s à prendre l'initiative pendant le voyage, par exemple en posant des questions, tandis que les membres à haut risque gardent un profil bas ?
L'équipe doit-elle se séparer si certains aspects du travail peuvent être réalisés sans impliquer les membres à haut risque ?
Y a-t-il un⋅e membre du groupe de conseils externes qui a déjà travaillé dans la région et qui peut aider l'équipe en lui donnant des conseils ?
Quel est le protocole de sécurité de l'équipe ? Les membres ont-elles, ils, discuté d'un plan de sortie (en cas de panique/ agression physique/accident d'un membre de l'équipe, etc.) Est-il plus sûr de se déplacer avec un véhicule unique et un chauffeur, ou de continuer à en changer ? Si la visite se déroule dans un endroit très fréquenté où il n'y a pas de place de parking à proximité, sera-t-il plus rapide de partir avec les moyens de transport disponibles le cas échéant ? Y a-t-il une personne ou une organisation locale qui peut être nommée/appelée en cas d'urgence ? Chacun⋅e a-t-il, a-t-elle, mémorisé les numéros des services d'urgence, des ambassades et de leurs hôtels ? Y a-t-il des personnes (personnelles/professionnelles) « au pays d'origine » qui ont tous ces numéros (et les coordonnées des vols/trains/bus de l'équipe) et à qui il a été demandé de les utiliser pour trouver des informations sur la localisation de l'équipe si elles n'ont pas de nouvelles des membres pendant un certain temps (décidé à l'avance) ? Les gens connaissent-ils les règles de circulation locales s'ils conduisent ou s'ils se promènent en tant que piétons ? Quelle est la question et la réponse de sécurité (une question anodine posée par téléphone ou par texto comme « comment est le temps là-bas » avec un "ok" signifiant que tout va bien et "il fait chaud" signifiant que la situation n'est pas sûre, et ainsi de suite) ?
Quel doit être le facteur déterminant dans le choix d'un lieu de séjour ? Un endroit situé en ville sera-t-il plus sûr en raison de la foule qui l'entoure et de l'accès aux secours en cas de besoin ? Ou un lieu situé en périphérie répondra-t-il mieux aux besoins de l'équipe si l'idée est de passer plus inaperçu ? Si une équipe de quatre personnes comprend deux membres à haut risque et deux membres à faible risque, doivent-ils, elles, séjourner séparément selon leur évaluation de sécurité et rester en contact virtuellement, et aussi limiter la surveillance si un endroit est plus « sur le grill » qu'un autre ? Quelles sont les considérations culturelles à prendre en compte ? Sera-t-il préférable que les personnes du même sexe restent dans un même lieu d'hébergement ? Ou les groupes mixtes ressemblant à des familles/amis/équipes de bureau seront-ils moins surveillés ?
Quelle est l'évaluation de la sécurité des personnes qui aident localement l'équipe et les personnes interrogées, et comment pouvez-vous donner la priorité à leur sécurité ?
Si l'équipe doit prendre des photos, est-il sûr d'utiliser un appareil photo ou de le laisser à l'hôtel, en optant plutôt pour des appareils téléphoniques ?
Comment le matériel sera-t-il stocké et sauvegardé en toute sécurité chaque jour ?
Lorsque l'équipe est confrontée à des questions sur qui elle est et ce qu'elle fait, quelle est la réponse commune que l'équipe a décidée ? Le travail individuel ou collectif des membres de l'équipe, accessible en ligne, présente-t-il des risques ? Comment l'équipe s'est-elle préparée à faire face aux questions et aux soupçons qui en découlent ?
Chacun⋅e dispose-t-il, elle d'une assurance maladie et des détails de son contrat ? Les informations relatives à la santé (allergies, groupes sanguins, état de santé préexistant, etc.) figurent-elles dans un document commun auquel les professionnels de la santé peuvent se référer en cas d'urgence sanitaire ?
Certains endroits nécessitent-ils un équipement de protection individuelle ?
La visite d'un lieu ou le transport de données à partir d'un lieu soulèvent-ils des questions juridiques ? L'équipe dispose-t-elle d'un conseiller, une conseillère, juridique dans son cercle qui pourrait l'aider à procéder à de telles évaluations spécifiques à cette région ?
Quelles cartes d'identité les membres de l'équipe porteront-elles, ils ?
S'il s'agit d'un voyage dans un autre pays, l'équipe a-t-elle consulté les conseils aux voyageurs de l'ambassade pour le lieu en question ?
L'équipe a-t-elle envisagé des risques autres que ceux directement liés à l'investigation, comme les petits vols entraînant la perte d'argent liquide, de documents, etc., et s'est-elle préparée en conséquence (en emportant des montants limités d'argent liquide, en décidant s'il est plus sûr d'emporter un document que de le laisser à l'hôtel, etc.)
En cas de stress extrême/événements traumatiques, l'équipe peut-elle se soutenir mutuellement ? Les membres sont-ils, elles, relié⋅e⋅, à des professionnels de la santé mentale qu'ils, elles, peuvent appeler dans ces moments-là ? (Lors de la couverture d'histoires liées à des traumatismes, vous devriez discuter avec vos mécènes pour savoir si un budget est prévu pour les services de santé mentale si nécessaire).
Bien que cette liste soit indicative, il y a beaucoup de questions à prendre en compte lorsque vous voyagez en équipe. Toutefois, ces questions sont toutes nécessaires pour que vous et vos collaborat⋅eur⋅ice⋅s soyez en sécurité et efficaces lors de votre investigation. Une fois que vous aurez préparé des modèles pour une investigation, vous pourrez continuer à les utiliser pour d'autres, en les modifiant au fur et à mesure que vous acquerrez de l'expérience en matière d'investigations collaboratives (et, espérons-le, en partageant ces indications avec nous afin que nous puissions les ajouter à ce guide !)
Voyager
Tous les projets ne disposent pas d'un budget permettant aux membres de l'équipe de voyager et d'investiguer ensemble. Par contre, s'il y a de l'argent pour couvrir les frais de voyage et d'hébergement, il y a une immense légitimité à le faire.
Rencontrer votre équipe en face à face est irremplaçable. Il n'y a rien de tel pour renforcer l'esprit d'équipe. Cela offre un soutien aux autres investigatrices, investigateurs, et, parfois, réduit le risque de sécurité qu'un⋅e membre pourrait prendre en investiguant seul⋅e. Lorsque les personnes interviewées voient qu'il y a une équipe, ou que des personnes de plusieurs régions sont impliquées dans l'investigation, et que celle-ci sera publiée à plusieurs localités, elles répondent parfois mieux et prennent plus de temps car elles sentent que ce qu'elles ont à dire atteindra plus de personnes.
Dans le même temps, la présence d'une « personne étrangère » pourrait éveiller les soupçons de certain⋅e⋅s. Consultez donc l'investigat⋅eur⋅rice résident⋅e localement pour savoir s'il y a une interview ou une visite de site à laquelle les autres membres de l'équipe doivent éviter de se rendre, et où ces autres membres doivent attendre en gardant un profil bas, laissant la personne locale en position d'investigation prendre l'initiative des questions.
Conseil :
Pour en savoir plus sur la façon de se préparer et d'agir lorsqu'on se rend dans un lieu étranger ou potentiellement hostile, consultez le guide concernant Les Interviews (Interviews nécessitant une approche particulière) et le Guide sur l'investigation de Terrain de ce kit.
Passer les frontières
Les frontières peuvent être des lieux de transit délicats où vous n'avez pas la position confortable de votre lieu de vie habituel et où vous n'avez pas encore reçu le soutien de votre équipe dans ce lieu éloigné. Vous êtes seul⋅e. Soyez patient⋅e, calme et coopérant⋅e à tout moment. Il peut y avoir plusieurs points de contrôle à franchir, et vous pouvez être interrogé⋅e pour un contrôle de routine ou une conversation informelle. Parfois, les barrières linguistiques peuvent entraîner des malentendus. Si votre langage corporel reste détendu et que vous maintenez une intention sincère de comprendre et de coopérer, vous courez moins de risques de donner l'impression d'être « étrang⋅er⋅ère suspect⋅e ».
Si vous vous rendez sur place en tant que représentant⋅e de média, préparez-vous à répondre de ce que vous allez reporter. Là encore, discutez-en au préalable avec le ou contact⋅e de la localité et l'équipe. Sans entrer dans les détails, vous pouvez donner une réponse générale. Dans certains pays, vous devez obtenir un permis ou une accréditation pour les médias quelques jours après votre arrivée. N'oubliez pas de le faire même si vous êtes absorbé⋅e par l'investigation, sinon cela pourrait poser problème à votre retour. Certaines de ces informations ne sont pas clairement disponibles en ligne et, même si votre collaborateur, collaboratrice, local⋅e peut s'en rendre compte, si c'est la première fois pour lui ou elle, certains détails de la procédure lui échappent. Si on vous le fait remarquer à l'entrée ou à la sortie du pays, acceptez l'erreur et soyez prêt⋅e à payer l'amende (à partir du fonds de prévoyance qui devrait être disponible dans votre budget). Il n'est pas rare qu'en voyant un passager coopératif, une passagère coopérative, qui a fait une erreur honnête, l'amende soit également supprimée si cela est laissé à la discrétion des fonctionnaires.
Il se peut que l'on vous fasse franchir plusieurs portes, que l'on vous laisse attendre dans plusieurs pièces et que vous soyez interrogé⋅e par une série de fonctionnaires. Il est utile d'obtenir la confiance d'une personne qui a suivi correctement toute la procédure de voyage et de visa, qui a coché toutes les cases, qui a tous les papiers, et qui a été patiente et sincère. Ainsi, cette erreur unique apparaîtra comme ce qu'elle est, une aberration, plutôt qu'une tendance. C'est pourquoi, lorsque vous passez en revue les règles relatives aux visas et que vous n'êtes pas sûr⋅e qu'un document soit nécessaire ou non, il est préférable d'avoir cet atout supplémentaire plutôt que de ne pas en avoir. Par exemple, si le visa est accordé à l'arrivée et que les frais peuvent être payés sur place ou en ligne, il est plus sûr de payer en ligne.
Puisque nous parlons ici surtout dans le contexte de la collaboration, il est important de noter qu'une personne travaillant seule peut avoir sa propre façon de faire les choses. Par exemple, il se peut qu'elle ne comprenne pas pourquoi une accréditation des médias est nécessaire dans le pays de destination si elle possède déjà une carte de presse dans son pays d'origine. Une personne peut vouloir argumenter sur ce point. Bien entendu qu'il est difficile de construire un argument solide sans connaître parfaitement les lois locales. Et si un débat houleux conduit les fonctionnaires à appeler votre collègue dans ce pays d'arrivée et à lui attirer une attention indésirable, cela pourrait ne pas être une bonne chose pour l'investigation et pour le, la, membre de l'équipe locale qui doit continuer à vivre sur place après le départ de l'équipe. Dans une équipe, prendre des décisions de manière isolée peut mettre tout le monde en péril.
Hébergement
Le choix de l'endroit où loger pendant l'investigation doit être fait en concertation avec la personne qui connaît le lieu. Un⋅e touriste peut se contenter de regarder le prix de la chambre et les équipements fournis. Toutefois, les investigatrices et investigateurs doivent décider si elles et ils ont l'intérêt rester en ville pour avoir un meilleur accès aux personnes interviewées et aux lieux, ou sil elles et ils souhaitent rester à la périphérie pour éviter de trop se faire remarquer et d'être repéré⋅e⋅s par trop de gens. Si le plan prévoit de travailler ensemble à l'hôtel pour rechercher/écrire/élaborer sur des inspirations, vérifiez si l'hôtel dispose de prises électriques domestiques et d'une salle de conférence calme.
Équilibrer vos besoins personnels et les priorités collectives de l'équipe
Il est préférable d'emporter des nécessaires tels que des nécessaires de toilette, plutôt que de supposer que l'hôtel ou même les magasins voisins en disposent. Ces nécessaires ne prennent pas beaucoup de place et ne pèsent peu lourd, et l'idéal est qu'à leur arrivée, les membres de l'équipe soient tous et toutes prêt⋅e⋅s à se plonger dans le travail dans le temps limité, plutôt que de devoir partir à la chasse au shampoing ou aux céréales dont ils, elles, ne peuvent se passer. Si vous oubliez quelque chose et que vous ne pouvez pas le retrouver rapidement et discrètement pendant les pauses ou les périodes de repos de l'équipe, essayez de vous en passer, à moins qu'il ne s'agisse de quelque chose de crucial comme des médicaments. Ne vous manifestez pas sans cesse en vous étonnant qu'un article « de base » ne soit pas disponible et ne stressez pas le membre de l'équipe résidente qui s'efforce de vous faire sentir chez vous. Ils et elles ne sont pas votre organisateur, ni organisatrices, de vacances ou votre guide touristique. Ils et elles doivent déjà faire face à un surcroît de travail parce qu'ils, elles, sont devenu⋅e⋅s les « hôtes » par défaut en raison de leurs connaissances locales. À moins qu'une investigation ne soit menée dans la région de chaque membre de l'équipe, vous n'aurez peut-être pas l'occasion de leur rendre la pareille. Adaptez-vous, adaptez-vous, adaptez-vous.
Plan de sortie
Malgré toutes vos précautions de sécurité, vous pouvez parfois vous retrouver dans un scénario inattendu et dangereux. Un plan de sortie est une méthode que vous définissez à l'avance et qui vous aide à vous sortir de ces situations et à revenir à une situation de sécurité. Aucune investigation ne vaut votre vie. Bien sûr, dans l'idéal, vous souhaitez protéger à la fois votre investigation et votre bien-être. Cependant votre plan de sortie doit également envisager le cas où le premier point ne serait pas possible. Votre plan doit inclure une stratégie qui donne la priorité à la vie et à la sécurité de votre équipe avant toute chose. Si vous pouvez vous sortir d'une situation menaçante en abandonnant les preuves que vous avez recueillies sur le site, vous devez le faire.
Avant de vous rendre sur le site, préparez un plan de sortie convenu à l'avance. Là encore, la personne résidente investigatrice dans l'équipe peut vous conseiller (il peut s'agir d'un⋅e militant⋅e, d'un⋅e journaliste, d'un⋅e guide ou d'une autorité locale qui vous emmène sur un lieu). Elle, il, peut également avoir la priorité lorsqu'il s'agit de connaître la langue locale. Une fois le plan de sortie établi, chaque membre peut le répéter à l'équipe, afin de confirmer que tout le monde a bien compris la même chose. Une situation tendue et urgente ne vous donne pas le luxe d'aller dans un coin et de murmurer une stratégie de sortie sur l'instant même. Si la situation est légèrement différente de ce que vous aviez préparé, attendez quelques instants que le, la, membre local⋅e improvise. S'il semble qu'elle ou il soit coincé⋅e⋅s, n'importe quel⋅le membre de l'équipe peut proposer quelque chose au plus proche du plan élaboré. C'est pourquoi il est crucial de passer suffisamment de temps ensemble avant de se lancer dans l'investigation afin que la confiance au sein de l'équipe puisse se développer.
Au théâtre, il existe un exercice appelé « chute en confiance », dans lequel le groupe se tient par la main en cercle et une personne commence à se pencher vers l'arrière, entraînant le groupe avec elle. Les corps des participant⋅e⋅s sont tendus et les personnes craignent la chute. Pourtant, la personne se laisse porter par le mouvement mettant sa confiance dans le groupe qui s'accordera si bien avec le corps des autres, et que les personnes à leur gauche et à leur droite s'accrocheront si bien à entre elles, qu'elle ira au plus loin à se pencher en arrière jusqu'au point limite avant de tomber. C'est le niveau idéal de confiance à cultiver au sein d'une équipe de collaboratrices et collaborateurs.
Au « boulot »
Une communication régulière
On n'insistera jamais assez sur ce point. Tenez-vous mutuellement informé⋅e⋅s, même s'il n'y a pas eu d'évolution majeure sur le plan du travail. Il est toujours préférable de partager vous-même les nouvelles. Personne n'aime être le, la, mauvaise flic qui demande sans cesse des rapports de situation ou envoie des rappels.
Parlez régulièrement. Si certaines décisions sont prises lors de réunions, mettez-les par écrit et partagez le document avec le compte rendu. Les documents partagés en ligne peuvent être mis à jour à tout moment, aussi lorsque vous fixez le moment de la discussion, tenez compte des fuseaux horaires. Signal et Wire sont des exemples d'applications assez sûres que les investigatrices, investigateurs, utilisent pour communiquer, par rapport à outils comparables comme WhatsApp ou les appels téléphoniques ordinaires. Essayez également d'utiliser des services de messagerie électronique plus sûrs comme riseup.net ou ProtonMail.
Durée
La réalisation d'un projet d'envergure peut prendre des mois, voire des années. L'enthousiasme du début d'un projet commence à s'estomper avec le temps. D'autres projets individuels peuvent commencer à réclamer l'attention des membres de l'équipe. Si les choses stagnent, essayez de raviver le sentiment d'appartenance à la communauté en trouvant des moyens de vous connecter les un⋅e⋅s aux autres. Continuez à lire sur le sujet que vous étudiez et partagez des liens et des notes avec les autres.
Interviews
Si vous demandez à des membres de l'équipe d'interviewer une source, seuls ou avec vous, veillez à les briefer correctement. Faites-leur savoir ce qui fait parler la source et quels sont les éléments alarmant à éviter. De cette façon, vous obtiendrez le maximum d'informations et vous ne perdrez pas la confiance de votre source. Dans certains cas, il peut être utile que votre partenaire pose des questions que vous ne voulez pas poser en raison de votre ancienne relation avec la source, des questions qui pourraient ne pas être bienvenues de votre part qui, pour autant, pourraient être autorisées si elles étaient posées par un⋅e nouvel⋅le investigat⋅eur⋅rice⋅s ou venue d'ailleurs.
Si une personne doit poser des questions qui risquent de rendre la personne interviewée menaçante ou agressive, essayez d'organiser ces entretiens dans des lieux publics comme les cafés, avec un⋅e autre partenaire à proximité et à une distance sûre. Pour en savoir plus sur les entretiens et les sources, reportez-vous aux chapitres Interviews : l'élément humain de votre investigation et Comment gérer vos sources.
Partager des ressources et des informations sur le projet
Au fur et à mesure que le projet se développe, il y aura des actualisations à partager, des détails sur les sources à compléter et de nouvelles questions à examiner. Choisissez des plateformes numériques sûres et faciles à utiliser sur lesquelles vous pourrez partager ces éléments. (Et ne gardez pas les informations pour vous ! Les collaborations ne sont pas des compétitions). Choisissez les applications qui font l'objet d'un consensus. Si quelqu'un⋅e est novice sur une plateforme, donnez-lui un coup de main jusqu'à ce qu'il ou elle s'y habitue.
Et n'oubliez pas que le partage ne se limite pas au projet en cours ! Les collaborations les plus réussies et les plus durables sont fondées sur la camaraderie et la solidarité. Lorsque vous ne travaillez pas, parlez à vos collègues de vos autres projets et intérêts. Si vous avez des idées, des contacts ou des informations sur des ressources qui pourraient faire progresser la carrière de l'autre, partagez-les généreusement.
Partage via les réseaux sociaux
Beaucoup d'investigatrices et d'investigateurs continuent de partager des mini-révélations ou des "teasers" sur les réseaux sociaux au cours d'une investigation. Si c'est votre cas, discutez-en d'abord avec l'équipe. Tout le monde est-il à l'aise avec la diffusion de ces bribes du travail en cours ? Est-ce même sans danger pour les personnes concernées ? Cela va-t-il créer des obstacles pour le reste de l'investigation ? Une tendance courante, et à l'apparence inoffensive, consiste pour des voyageurs à partager en ligne des photos de leur carte d'embarquement. Dans le cadre d'une investigation, cela signifie que vous pourriez alerter des personnes néfastes sur votre voyage, et les détails et le code-barres figurant sur la carte pourraient facilement faciliter l'usurpation d'identité.
Si vous avez l'intention de prendre et de partager des photos qui ne sont pas directement liées à l'investigation, par contre, qui montrent les membres de l'équipe, consultez d'abord tout le monde. Il se peut qu'elles et ils ne veuillent pas que leurs photos soient diffusées sur les réseaux sociaux pour des raisons personnelles. De plus, une photographie apparemment anodine peut également soulever des questions telles que « pourquoi ce groupe de personnes traîne-t-il ensemble ? »
Il y a aussi la question de la sécurité des sources et des personnes interrogées si vous partagez leurs images. Ou si vous partagez leurs déclarations avant la fin de l'investigation, vous risquez de les mettre en danger.
Documenter la méthodologie
Le rassemblement d'un groupe d'investigatrices et d'investigateurs, chacun avec un ensemble unique de compétences, n'arrive tous les jours. La méthodologie de votre investigation sera probablement aussi passionnante à lire que l'investigation elle-même. Elle gagne également la crédibilité de l'auditoire. Prévoyez du temps dans votre planification pour documenter cela périodiquement.
Faire le point
Nos vies personnelle et professionnelle se chevauchent constamment, avec le travail à domicile et les plateformes de réseaux sociaux qui affichent nos photos de vacances à côté du lien vers le dernier exemple de notre travail professionnel. Vous pouvez être en train de travailler, pourtant votre téléphone portable peut tout de même recevoir un SMS un peu inquiétant de chez vous. Au lieu de prétendre que la vie des gens existe dans des compartiments étanches, prévoyez un espace et un temps sûrs pour des vérifications régulières.
Il ne s'agit pas de remplir une formalité ou de demander aux gens de partager quelque chose de personnel qu'ils ou elles ne veulent pas. Un véritable souci du bien-être de l'équipe peut se traduire par le simple fait de demander de leurs nouvelles, d'être ouvert⋅e à l'écoute, d'offrir tout le soutien possible et de partager des notes sur les pratiques de soins personnels. Le fait de connaître la vie et les difficultés des autres contribue à susciter l'empathie. Cela peut contribuer à favoriser un sentiment de fidélité, d'appartenance et d'engagement au sein de l'équipe.
Reconnaître le travail et les contributions de chacun⋅e
Dans le travail d'équipe, les contributions et les efforts individuels se perdent parfois. Prenez le temps d'apprécier, de féliciter et de célébrer les personnes dont les contributions permettent à l'équipe de faire un pas de plus vers la réussite de l'investigation. Le fait d'être précis⋅e dans vos compliments est un bon moyen de faire savoir au destinataire que vous êtes sincère. Remerciez le ou la collègue qui s'est toujours enquis des progrès de chacun⋅e, dites le nom la personne qui a réussi à organiser toutes les informations collectées en un seul endroit, et ainsi de suite.
Être sensible à la diversité culturelle
Soyez respectueux, respectueuses, des différents milieux, ethnies, groupes d'âge, genres, nationalités, religions, langues, histoires et sexualités des membres de votre équipe. Essayez de vous instruire un peu sur leurs cultures avant de commencer à travailler avec elles et eux. Et n'oubliez pas que ce n'est pas à elles ou eux de vous expliquer les choses ou de vous enseigner ces notions de base.
Cela vaut pour votre relation avec les membres de votre équipe, et aussi pour toute autre personne avec laquelle vous pourriez collaborer ou sur laquelle vous pourriez compter au cours de votre projet. Il est important de toujours être conscient⋅e de votre position et de celle de votre équipe par rapport aux autres groupes avec lesquels vous travaillez. Si vous considérez les voyages et l'interaction avec les communautés, par exemple, en tant que visit⋅eur⋅rice invité⋅e, vous pouvez bénéficier de plus ou moins de libertés que l'hôte. Plus de liberté peut créer plus d'espace pour vos actions en tant qu'investigatrice(s), investigateur(s), en revanche cela peut mettre en danger et exposer vos hôtes, et vice versa -- personne n'est neutre ou invisible. Le risque est hérité.
Suivi de la collaboration
La publication des résultats d'une investigation collaborative est un motif de réjouissance pour toute l'équipe. Cependant, elle peut aussi parfois être ressentie comme contre-apogée. Toutes les investigations n'entrent pas dans l'espace public en faisant un carton. Certaines excellentes investigations en profondeur prennent un certain temps avant que les gens ne les examinent et ne les traitent. L'impact peut prendre des mois ou se produire de manière indirecte, sans que l'équipe ne le perçoive immédiatement. Ne laissez pas l'esprit d'équipe et la satisfaction d'un travail bien fait être éclipsés par ces facteurs. Il n'y a rien d'incorrect à faire durée le plaisir (d'un apogée lent).
Après des célébrations bien méritées et un repos aussi bien mérité, vous pouvez pousser la collaboration un peu plus loin en dressant pour vous-mêmes la liste des emplacements et des personnes avec lesquels vous aimeriez spécifiquement partager les résultats. L'Internet regorge d'informations et d'investigations nouvelles chaque jour, peut-être les groupes de votre public cible ne les ont pas vues. Pensez également à des approches innovantes pour le présenter aux gens : une présentation dans votre communauté, une performance avec un groupe d'arts ou avec un théâtre politique dans votre localité, une revue qui pourrait vouloir traduire et distribuer les résultats dans une autre langue, les possibilités sont infinies.
Lorsque vous partagez vos résultats avec le public, remerciez toutes et tous tous ceux qui ont contribué au travail, qu'ils, elles, soient des investigatrice⋅s actives, investigateurs actifs ou non (à l'exception des personnes qui ont demandé l'anonymat). Partagez vos résultats avec ceux et celles qui pourraient vous donner un retour constructif, à commencer par tous vos personnes de conseils et supporters.
Veillez à ce que tout le monde soit payé à temps. Il est non seulement frustrant pour un⋅e membre de l'équipe d'envoyer sans cesse des rappels pour le salaire qu'il, elle, a gagné⋅e, et aussi irrespectueux à son égard. Les retards de paiement peuvent également avoir un impact négatif sur la situation financière d'une personne. Nombreux sont celles et ceux qui choisissent de ne plus travailler avec ceux qui ne cessent d'avoir du retard dans leurs paiements.
Réussir une investigation collaborative n'est pas une mince affaire, Néanmoins les récompenses sont à la hauteur des défis. La relation entre les membres d'une équipe qui s'unissent pour résister à des crises de toutes tailles est quelque chose qui peut durer toute une vie. Avec ce niveau de confiance et de confort éprouvé, vous pouvez envisager des investigations complémentaires ou en lancer de nouvelles. Le travail de suivi contribue également à renforcer l'impact au fil du temps, alors conservez soigneusement toutes vos notes et transcriptions. Une équipe efficace ayant mené à bien une investigation a également plus de chances d'être financée à l'avenir.
Il peut sembler facile et simple de travailler seul⋅e. Pourtant, dans la société actuelle, qui se polarise rapidement, les investigations collaboratives cultivent les liens, nous font comprendre les problèmes de différentes régions et de différents groupes de personnes, et nous incitent à rechercher les similitudes plutôt que les différences. À partir de nos problèmes communs, nous trouvons des solutions communes.
Remerciements :
Ce guide n'aurait pas été possible sans les rencontres, les collaborations, le soutien et les réactions de nombreux pairs dans le domaine de la recherche et de l'investigation. De nombreuses personnes ont apporté leur expérience, leurs connaissances et leur gentillesse. Merci à : Manuel Beltran, Xavier Coadic, Wael Eskandar, Felix Farachala Valle, Coco Gubbels, Alison Killing, Tyler McBrien, Beatriz Quesadas, Laura Ranca, Nuria Teson, Marek Tuszynski.
Publié le 15 Juin 2021
Ressources
Remarque : un grand nombre des ressources ci-dessous s'adressent aux journalistes, mais la plupart des astuces et conseils peuvent être tout aussi pertinents pour les investigatrices et investigateurs qui ne sont pas journalistes.
Notez que la liste des ressources ci-dessous est en anglais.
Conseils pour collaborer
10 best tips for collaborations between journalists and coders. by Albertine Piels / Hackastory.
10 tips for successful collaboration among journalists. By Guilherme Amado, Xin Feng, Titus Plattner & Mago Torres / GIJN, 15 January 2018.
Citizen investigations Guide. By GIJN.
Collaborative journalism workbook. A workbook for planning and managing the details and logistics of editorial collaboration. By Project Facet.
Collaborative data journalism guide. By Rachel Glickhouse / Propublica.
Collaborative journalism videos). Various tips, interviews, tutorials.
Collaboration: preparing for potential challenges. By Sarah Gustavus / IJNET 9 January 2019.
How to create a data journalism team. By Fabiola Torres López / GIJN, 11 July 2017.
Journalists offer tips for collaborating on data journalism projects. by Korey Matthews / International Journalists Network (IJNET), 13 February 2019.
The power of journalism collaboration is also the power of inclusion - here's how to harness it. Christine Schmidt / NiemanLab, 20 May 2019.
The collaborative journalism checklist. by IJNET, 9 January 2019.
Collaboration transfrontalière
Cross-border journalism: An exercise in international team-working.
Cross-border data journalism - webinar. by International Center for Journalists (ICFJ).
How do I run a journalistic collaboration across borders?. by Hostwriter.
How editors and journalists can use Hostwriter's new tool to collaborate. By Hostwriter.
Tipsheet: How to build a team for a cross-border project. By Piotr Drabik / Hostwriter.
Tips for journalists interested in cross-border collaborations. By Patrik Egwu / IJNET, 11 February 2021.
Tips for leading cross-border journalism teams. By Taylor Mulcahey / IJNET, 9 January 2019.
Unfamiliar ground: A few tips on international reporting. By Lam Thuy Vo, 22 March 2012.
Why Hostwriter is launching a cross-border newsroom in 2021. By Tabea Grzeszyk / Hostwriter.
Collaborations locales
A model collaboration that's working to rebuild local news in Colorado. By Christine Schmidt/ GIJN, 30 July 2019.
Case studies in collaborative local journalism. By Joy Jenkins, Lucas Graves, 2019.
Collaborating with small, local media. By Heath Haussamen / IJNET, 9 January 2019.
Canadian publication, The Discourse, collaborates with their community: Case study. By Jacky Habib / IJNET, 9 January 2019.
In Las Cruces, Mexico, local newsrooms collaborate on large-scale investigation. IJNET.
Collaborations médiatiques
12 tools to make your newsroom more collaborative. By Daniel Palumbo, 11 July 2014.
25 ways community members can support your newsroom. By Emily Goligoski and Stephanie Ho / GIJN, 18 February 2019.
Brazil: Anti-disinformation campaign launched at Abraji conference. By Repórter do Futuro / GIJN, 6 July 2018.
Collaboration and the creation of a new journalism commons. By Carlos Martínez de la Serna, 2018.
How they did it: News collaboration exposes how special interests use 'model' litigation. By Denise-Marie Ordway, 10 March 2020.
Partnerships and collaborations can help expand your reporting and reach. By Caroline Porter / GIJN. 15 April 2019.
Autres types de collaborations
A new collaboration sets a higher bar for working with whistleblowers. By Rowan Philp, 6 August 2018.
How Forensic Architecture supports journalists with complex investigative techniques. By Olivier Holmey, 29 June 2020.
New models: How academics, nonprofit news and government are collaborating. By Peter W. Klein, 13 November 2018.
The case for a collaborative project coordinator. By Sarah Gustavus, 9 January 2019.
Working together 101: How academics and journalists can collaborate. By Laura Laderman and Sinduja Rangarajan.
Études de cas
After Mexican journalist's murder, colleagues come together to investigate. By Carolina de Assis / GIJN, 17 September 2019.
Brazil's Agência Pública: Where journalists innovate and collaborate. By Carolina de Assis, 9 April 2018
Cities for Rent - Investigating Corporate Landlords Across Europe, cross-border collaborative investigation coordinated by ARENA for Journalism in Europe, launched in May 2021.
Collaborating Across Borders During COVID-19. Hostwriter.
Indian journalists challenge government over coronavirus transparency. By Sukhada Tatke / GIJN, 6 May 2020.
How an innovative health website in South Africa is covering Covid-19. By Eduardo Suárez / GIJN, 134 May 2020.
How Latin American Media outlets are collaborating on Covid-19 investigations. By Marina Estarque / GIJN, 4 May 2020.
How Lava Jato brought together Latin America's investigative journalists. By Catalina Lobo-Guerrero / GIJN, 14 August 2019.
How they did it: The Azerbaijani laundromat. By Stella Roque/OCCRP, GIJN 8 November 2017.
How they did it: Enslaved land investigation. By Ana Prieto / GIJN, 22 August 2017.
How 90 outlets are working together to fight misinformation ahead of Mexico's elections. By Joseph Lichterman / GIJN, 13 June 2018.
How they did it: ProPublica's engagement journalism. By Eunice Au / GIJN, 25 October 2017.
Investigative journalism in the V4: How Polish, Hungarian, Slovak and Czech Reporters work together. By Lorenzo Berardi, 24 April 2019.
It's about people, not only algorithms. By Guilherme Amado, 11 June 2018.
Operation car wash: An 11-country project on cross-border corruption. By César López Linares, 20 June 2017.
Analyses et recherche
Comparing models of collaborative journalism - .pdf document. By Sarah Stonbely, 2017.
Global teamwork: The rise of collaboration in investigative journalism. Edited by Richard Sambrook, published by the Reuters Institute for the Study of Journalism at the University of Oxford.
What investigative journalism will look like in 2020. By By Eunice Au / Global Investigative Journalism Network, 15 January 2020.